Le combat le plus important

Je viens de rencontrer Jon-Kalman Stefansson!

Non,pas dans ma rue, ni même en chair et en os, mais à travers son écriture. Celles et ceux qui l’ont lu savent que c’est un auteur marquant.

Elle aurait pu se produire beaucoup plus tôt, cette rencontre, lorsque j’avais un blog littéraire et que je chroniquais régulièrement mes lectures. Tout le monde à l’époque parlait du roman « Entre ciel et terre », mais je ne sais pas pourquoi, cet auteur était passé entre les mailles de mon filet. Peut-être tout simplement parce que le temps de cette rencontre n’était pas encore venu.

La liberté de créer

Dans « Ton absence n’est que ténèbres« , les histoires s’entrecroisent, filent sur plusieurs générations, et à la lecture de ce roman, on perçoit la densité de l’auteur, la richesse de ses pensées, de ses souvenirs et de ses images, mais aussi sa grande liberté dans la manière de mener l’histoire. Et c’est peut-être ce que je retiendrai le plus longtemps, au-delà de l’attachement que j’ai pu éprouver pour tel ou tel personnage : la liberté du créateur.

C’est pour moi un principe de base. Le premier. Celui par lequel tout peut commencer. Mais qu’il est difficile de s’accorder cette totale liberté! Comme c’est angoissant et ardu de sauter par dessus les barrières, de pousser les murs, de dépasser les petites préventions qui balisent notre quotidien.

Le combat le plus important de chaque individu, c’est celui qu’il livre contre sa propre personne.

Ton absence n’est que ténèbres, Jon-Kalman Stefansson

S’égarer pour mieux se retrouver?

Je me trouve, depuis plusieurs mois, dans une période d’interrogation et de remise en question. Au fil des années, j’ai dérivé de mon objectif initial – qui était de peindre, parce que quand je peins, je suis bien, je suis dans « mon » espace. Je me suis retrouvée avec tout un tas de choses à faire, de croix à cocher sur ma liste de tâches, à tel point que la peinture n’avait plus qu’une toute petite partie dans mon organisation.

Je n’étais plus du tout dans la liberté si chère à mon cœur quand il s’agit de créer. J’étais prise par tellement d’autres considérations – être visible, vendre mon travail, créer et animer des stages, etc… – que je n’avais plus autour de moi cet espace nécessaire à l’émergence de nouvelles idées, ni le temps pour attendre que le chemin se dessine peu à peu, comme de lui-même, à force de recherches et d’exploration.

Aujourd’hui, la situation est encore plus inconfortable pour les artistes. Aux deux années de covid succède une crise économique dont on ne sait pas encore l’ampleur. Or, on sait très bien que, dès qu’il s’agit de faire des coupes dans le budget, les ménages privilégient bien évidemment l’essentiel, et le superflu – l’art, la culture, etc… – passe à la trappe. C’était déjà patent cet été, et je pense que cela ne fera que se renforcer.

Face à cette situation, faut-il encore chercher à s’adapter? Ajouter des contorsions aux contorsions? Quémander deux euros par-ci, cinq euros par-là en échange d’une vidéo, d’un « bonus » comme c’est déjà le cas sur Patreon, par exemple?

A contre-courant

Pour moi, ce contexte anxiogène et difficile me pousse plutôt à me dire : quitte à être dans l’inconnu, je vais faire ce qui me plait, et de la façon dont ça me plait. J’ai envie de retrouver cette liberté, de mener ce combat contre cette part de moi-même, qui s’est égarée en chemin, en cherchant la sécurité, le succès, le confort, la certitude, et que sais-je encore.

Le combat le plus important, c’est celui qu’on mène contre soi-même. Je suis tellement d’accord avec cette citation, que je l’ai surlignée et que je la partage avec vous aujourd’hui!

C’est un combat pour s’écouter, d’une manière non-complaisante, et entendre ses véritables aspirations.

C’est un combat pour s’autoriser à aller vers ce qui nous « obsède », à explorer, à défricher, à essayer au risque de se tromper, de rater, de dilapider son temps.

C’est un combat pour résister à l’influence et à la pression extérieures.

Un combat pour ne pas plier sous la pression intérieure, faite de peurs, d’anxiété, d’auto-sabotage, de honte, de culpabilité…

Alors en ce moment, je suis là-dedans, essayant, un jour après l’autre de creuser l’espace qui s’est rempli autour de moi pour faire plus de place, à l’art, à la recherche, à la création. Je veux garder le cap sur la Liberté. Mon ambition, pour le moment, est de mener chaque jour à son terme du mieux possible, et de ne plus négliger mon envie de créer. Je m’égarerais sans doute de temps en temps, mais je sais que j’ai encore plein de romans de Stefansson à découvrir. Cet auteur essentiel, dont les livres nous aident à retrouver le bon chemin…

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