Certaines personnes m’ont demandé s’il serait possible de voir mon travail quelque part cet été. La réponse est non, et je tiens à vous expliquer pourquoi.

Ces dernières années, vous le savez, ont été difficiles et éprouvantes à bien des égards, à la fois physiquement et psychologiquement, pour tout le monde. Je pense qu’on commence à peine à se remettre de leurs effets. Elles ont été aussi pour moi synonymes de plusieurs projets d’envergure. Depuis 2020, en effet,

• j’ai acheté la maison de Botbihan, dans les Monts d’Arrée et y ai fait divers travaux
• là, j’ai lancé mon atelier en proposant d’abord des cours, puis des stages
• j’ai réalisé plusieurs expositions chez moi ou ailleurs
• j’ai lancé ma chaine YouTube et je propose entre deux et quatre vidéos par mois
• plus récemment, j’ai lancé un podcast avec Sabina Pinzan
• j’anime le groupe Art/System sur Facebook
• je développe et aménage mon jardin dans les monts d’Arrée

Pendant ce temps, j’ai bien sûr continué à peindre. J’ai aussi créé divers cahiers, carnets et sketchbooks. Tout cela a représenté beaucoup de travail et d’investissement personnel. Avec des résultats plus que mitigés. Ces quatre dernières années, j’ai n’ai pas beaucoup vendu de peintures. J’ai eu des stagiaires, mais mon atelier étant petit, leur nombre était limité. Les réseaux sociaux, en modifiant sans cesse leurs algorithmes rendent ma visibilité limitée sur Internet. Je ne vous cache pas que c’est décourageant. A de nombreuses reprises, je me suis demandé s’il ne valait pas mieux que je m’occupe de mon potager…

Tous ces efforts ont eu pour effet aussi de m’éloigner de ma base: la “pure” création artistique.

Aujourd’hui, je ressens profondément des besoins que j’ai négligés ces dernières années. Notamment celui de me “retrouver” et de me donner du temps pour expérimenter, chercher de nouvelles directions, pour jouer, sans aucune pression d’aboutir à un résultat qui soit “vendable”.

J’ai décidé de me donner ce temps – quelques mois au moins – parce que j’ai besoin de nouveauté, et récemment, j’ai eu l’impression de tourner en rond, revenant aux mêmes gestes, aux mêmes techniques. J’ai besoin de cette totale liberté qui est, pour moi, un des piliers de la création.

J’ai envie d’expérimenter avec la peinture acrylique, et de me donner la permission de faire du “moche”. J’ai envie de poursuivre mon exploration de la gouache et de l’aquarelle, qui se prêtent bien à des réalisations différentes, notamment un travail sur le paysage, la végétation, etc…

J’ai depuis longtemps le désir aussi d’aller travailler en extérieur. Dans et avec la nature. Mais je procrastine, je procrastine… Je ne ne me suis toujours pas fait de kit de sortie, je n’ai pas de panier sur mon vélo, et je n’ai pas choisi où aller. Mais le désir est là, et comme il ne passe pas, je me dis qu’il correspond à un rêve authentique en moi.

Constellations

J’ai aussi envie de consacrer du temps à la confection de carnets et de sketchbooks. Vous le savez, travailler à la fois sur le fond et la forme, c’est un peu mon dada. Et l’univers des sketchbooks me fascine littéralement. A tel point que je me demande si je ne vais pas m’y consacrer exclusivement pendant un certain temps…

Ce choix correspond aussi à un besoin, pour moi, de limiter toute forme de pression. Je n’ai jamais bien travaillé dans l’urgence et le stress. Je suis fondamentalement quelqu’un qui aime s’y prendre à l’avance, planifier, et savoir où elle va. Dès que les attentes s’amoncellent, mon mental se met en accélération permanente, et cela a des répercussions fâcheuses sur mon sommeil, qui à son tour a des effets délétères sur mes niveaux d’énergie. Et ça, c’est dangereux parce que la fatigue s’accumule, je perds mon enthousiasme, je vois tout en gris anthracite et l’envie de lâcher l’affaire se profile assez vite à l’horizon…

Cette décision de ne pas exposer et me donner du temps pour explorer créativement vient s’agencer dans une volonté plus profonde et affirmée de mieux prendre soin de moi et de m’écouter, chose que je n’ai vraiment pas assez faite dans ma vie. Pendant très longtemps, la vie de famille et l’éducation aidant, les attentes des autres sont passées avant les miennes, et je prends conscience aujourd’hui à quel point j’ai laissé certains domaines en jachère… Je pense que je ne suis pas la seule à dépasser la cinquantaine et à me rendre compte de cela.

Comme l’art, c’est la vie, il faut bien agir dans les deux sphères. Et commencer à s’écouter en matière de création, c’est commencer à s’écouter tout court!

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